En 1982, Hissein Habré prend le pouvoir et succède à Goukouni Oueddei en tant que président de la République du Tchad. Il reste à la tête du pays jusqu’en 1990 et s’exile à Dakar (Sénégal) suite à un coup d’Etat. Hissein Habré est alors accusé de crimes contre l’humanité, de crimes de guerre et de tortures qu’il aurait commis durant son temps au pouvoir.
Les différentes démarches judiciaires sur le plan national, continental et international entamées par les associations de victimes, les sociétés civiles, les ONG locales et internationales ont conduit à une entente de principe entre l’Union africaine et le Sénégal sur la mise en place des chambres africaines extraordinaires (CAE). Greffées au système judiciaire sénégalais, les CAE ont pour objectif principal de juger Hissein Habré. Le procès a débuté le 20 juillet 2015 à Dakar (Sénégal).
Thinking Africa porte un intérêt au cas Hissein Habré car le contexte global de la tenue du procès soulève la question de la légitimité pour juger les crimes contre l’humanité commis par les chefs d’Etat africains. En effet, qui est légitime pour les juger? Au niveau international, la Cour pénale internationale (CPI) est déjà discréditée dans ce rôle car elle serait « anti-africaine», « impérialiste » et « raciste ».
La grande majorité des cas traités à la CPI depuis son entrée en vigueur en 2002 sont africains (Côte d’Ivoire, Soudan, Kenya, RDC entre autres). Au niveau continental, les Chambres africaines extraordinaires (CAE) sont mises en place pour corriger les failles de la CPI mais sa légitimité est aussi remise en cause lorsque la question de son financement est posée. L’Union africaine brandit l’article 16 du traité de Rome et met en avant l’immunité des présidents en exercice lorsque ceux-ci font l’objet d’une accusation. Enfin, les pays hébergeant des chefs d’Etat soupçonnés d’avoir commis des crimes contre l’humanité les extradent ou les arrêtent très difficilement. Bref, la question reste entière: Qui est légitime pour juger les crimes contre l’humanité commis en Afrique ?
Dans ce contexte, Thinking Africa, en partenariat avec Trust Africa, a réalisé des entrevues avec des membres de la société civile, des étudiants en droit et des experts pour apporter un éclairage sur les différents aspects du procès Hissein Habré et ses implications pour la justice et la lutte contre l’impunité en Afrique.